Actu et Management

Libertés des plus âgés : « Le vieillissement est une chance pour la société ! »


Publié le Lundi 4 Octobre 2021 à 10:33

Clôturant, mardi 28 septembre, le congrès national des âges et du vieillissement, une table-ronde réunissant spécialistes, professionnels et personnes âgées, s’est intéressé à la notion de liberté en établissement et à domicile. Mise à mal par la crise sanitaire, cette liberté « doit être garantie », ont insisté les participants.


©Capture
Organisé par l’Association des Directeurs au service des Personnes Âgées (AD-PA) et l’association Citoyennage, le congrès national des âges et du vieillissement se tenait lundi 27 et mardi 28 septembre à Paris. Également retransmis en direct sur internet, il s’est intéressé aux interrogations du secteur, avec, en table-ronde finale, une réflexion globale sur la liberté des personnes âgées, qu’elles habitent en établissement ou à domicile. 
 
« La crise a été une situation pénible, nous avons été privés de nos libertés fondamentales encore plus que toute autre population », a indiqué dès le début des débats Philippe Mort, membre du conseil d’administration de Citoyennage. « L’expérience de la crise sanitaire nous a montré que nous avions envie de vivre mais pas dans n’importe quelles conditions », a ajouté Mme Galland, elle aussi membre de l’association. Si la crise a fait l’effet d’un électrochoc, « même aujourd’hui, être libre est un combat de tous les jours », a constaté Philippe Mort. Tous appellent donc à un maintien de leurs libertés, à la possibilité de faire des choix mais aussi d’être autonome, « de pouvoir faire ce qu’on peut », a résumé Philippe Mort.
 

Ce que le droit prévoit

La liberté des plus vulnérables est toujours un sujet complexe dans le secteur du grand âge. Pourtant, « le droit garantit la liberté de tout un chacun, y compris des personnes âgées », a insisté Tatiana Gründler, juriste auprès de la Ligue des Droits de l’Homme. « Il est vrai que le droit les appréhende parfois par le biais de leurs vulnérabilités. On peut alors se demander si cette protection impose des limites de libertés, mais pour moi ce n’est pas nécessairement le cas, au contraire : le droit peut répondre aux besoins, instaurer le congé des aidants, l’APPA… », a ajouté la jeune femme tout en soulignant « la complexe ambivalence » dans les EHPAD, considérés à la fois comme un domicile et un lieu de vie collective. « Cela engendre des contraintes mais il ne faut jamais oublier qu’on est au domicile de la personne ! », a-t-elle noté.
 

Chez soi ou pas ?

« “En EHPAD à domicile”, je voudrais que ce soit vrai mais je n’y crois pas », a quant à lui ajouté Michel Bille, sociologue qui « préférerai[t] » utiliser l’expression « Ici pour vous » qu’ « Ici chez vous ». Depuis longtemps présent dans la sphère publique, ce débat sur le lien entre EHPAD et domicile se poursuit, y compris chez les résidents. Mme Garrand a par exemple indiqué qu’elle se sentait « tout à fait chez elle » dans son établissement. « Afin de sortir de cet écueil, l’AD-PA propose que tous les établissements puissent, s’ils le désirent, devenir des résidences services seniors », a alors détaillé Pascal Champvert, président de l’association.
 

Garantir les libertés

« Le “chez soi” est une notion importante mais pour garantir les libertés, il faut aussi s’interroger sur les désirs, laisser le choix et agrandir l’éventail des choix possibles », a ajouté Paul Vérot, ex-directeur d’établissement en PACA. Afin de justement garantir les libertés des résidents comme des personnes âgées à domicile, Tatiana Gründler a ici recommandé de « s’interroger toujours sur le motif des restrictions », et « si on prend cette décision dans l’intérêt de la collectivité ou de la personne ». « Dans ce dernier cas, il faut alors se demander quels sont les désirs de cette personne », a insisté la juriste.
 
Bien sûr, se pose ici aussi le problème des personnes souffrant de troubles cognitifs et des difficultés de jugement qui y sont souvent associées. « On doit alors adapter les choix, surtout au début de la maladie », a conseillé Anne David-Bréard, médecin et présidente du Syndicat National de Gérontologie Clinique (SNGC). « Il n’y a pas de réponse toute faite mais on doit avoir un diagnostic précis et rapide pour un accompagnement adapté, qui peut aller jusqu’à la curatelle. Là ce n’est plus de la vulnérabilité mais bien de la pathologie », a-t-elle insisté.
 

L’analyse du sociologue

Accompagnement, prise en charge de la dépendance, combinaison des savoirs… Tous ces facteurs de respect des libertés et de bien-être, pour les équipes comme les résidents, fontout de même face à un problème majeur : le manque de temps des professionnels qui, « véritables piliers, sont le plus souvent débordés », a constaté Philippe Mort. « La liberté ne doit pas pâtir du manque de moyens, y veiller est aussi notre responsabilité en tant que citoyens », a alerté Michel Bille. « Depuis des années, nous acceptons tous de regarder le grand âge comme une charge plutôt que comme un investissement. Pourtant le secteur est pourvoyeur d’emplois et de tellement d’autres choses : l’économie des territoires bien sûr, mais aussi les échanges sociaux, culturels… Le vieillissement est une chance pour la société ! », a-t-il clamé.
 
« Nous sommes dans une société âgiste, cela, il faut en avoir conscience », a ajouté Pascal Champvert. « Ces derniers mois, entre crise sanitaire et crise des gilets jaunes, de nombreuses cartes ont été rebattues, nous avons payé le prix fort mais nous avons aussi vu la société changer. Tous veulent aujourd’hui plus d’espace, de décision collective, bref d’empowerment. Nous devons en profiter, nous adapter et mettre notre secteur en lumière, ne jamais se taire pour que tous soient mieux respectés », a conclu le président de l’AD-PA.
 


Dans la même rubrique :